La commission nationale sécu, santé, social du NPA livre son analyse sur le contenu et les conséquences du "pacte de responsabilité" du gouvernement
C’est un cadeau de 65 milliards aux employeurs d’ici 2017 (15 milliards en 2014 et 50 milliards entre 2015 et 2017). Les employeurs n’auront plus à acquitter certains impôts et cotisations sociales. Les économies porteront sur les budgets de l’Etat, des collectivités territoriales et de la Sécurité sociale. Les recettes fiscales et sociales seront donc réduites d’autant. Concernant le CICE (Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi), rien n’est encore clair. Hollande a présenté lors de ses vœux aux « forces vives » plusieurs scénarios possibles : « le pérenniser et l’augmenter… le transformer en baisse de charges dont il nous appartiendra de fixer l’ampleur… Le compléter par d’autres allègements. " Il a aussi indiqué par ailleurs qu’il fallait engager une réflexion sur « le mode de financement de la protection sociale » dans sa totalité.
1ère mesure officielle : la suppression des cotisations allocations familiales (elles sont uniquement « patronales »). D’ici 2017, 30 milliards d’euros de salaire socialisé pourraient donc être ainsi volés aux salariés. Le montant total des cotisations se montent à 35 milliards mais les établissements publics ne seraient pas exonérés, ainsi par exemple : les cliniques privées le seraient, mais pas les hôpitaux publics !
2ème annonce : des économies. En 2014, 15 milliards dont une grosse part proviendrait de la branche maladie de la Sécu. Le gouvernement préconise de développer les génériques et les soins ambulatoires. L’exemple de l’Hôtel-Dieu de Paris transformé en « hôpital debout » pourrait être étendu. Le journal « les Echos » se basant sur les rapports de l’IGAS et des finances indiquait récemment que ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Sur les économies de Sécu, 60 % des gains doivent venir des hôpitaux. Pour réaliser de telles économies, il faudra -par exemple - éviter les hospitalisations pour insuffisance cardiaque des personnes âgées, il faudra gratifier les hôpitaux bons élèves par des contrats de performance, il faudra fermer certaines urgences dans les zones denses, quitte à investir dans les maisons de santé (le terme est trompeur, ce sont en fait des cabinets de médecine libérale avec des contraintes horaires).
C’est donc plus particulièrement dans les 1100 hôpitaux publics qui manquent cruellement de moyens et affichent un déficit global de 400 millions d’euros en 2013 que les coupes budgétaires sont prévues
Cela ne sera pas suffisant pour atteindre les dizaines de milliards d’économie.
Rien n’est annoncé officiellement. Mais certaines mesures sont prévisibles, telles que :
* la fiscalisation du financement de la sécurité sociale : le MEDEF sait qu’une réduction trop brutale des prestations peut conduire à une explosion sociale. Depuis 1953, et jusqu’en 2010, il n’y a jamais eu d’attaques d’ampleur contre la Sécu sans riposte sociale. Le patronat ne renonce évidemment pas à une réduction des dépenses sociales, mais il considère que ce n’est pas possible au-delà d’un certain niveau et maintient sa revendication de financement de la sécu par la TVA « sociale » apparemment plus indolore ou par la CSG (qui repose à plus de 70 % sur les salaires et à plus de 17 % sur les revenus de remplacement - pensions retraites, indemnités maladie et chômage…).
*une Sécu sous conditions de ressources
L. Jospin en 1998 avait mis en place cette disposition pendant neuf mois pour les allocations familiales Le tollé des associations familiales avait abouti au retrait de la mesure neuf mois après son application. Hirsch, sous Sarkozy, avait élaboré un rapport préconisant un bouclier sanitaire pour la santé. Les prestations seraient modulables selon les revenus des malades et les ressources de la Sécu.
Sous divers prétextes - le déficit par exemple -, le plafond de ressources pour bénéficier des prestations baisserait et le nombre de bénéficiaires des prestations réduirait.
A terme, la sécurité sociale serait un système de simple assistance aux plus démunis, le seul recours pour les autres étant l’assurance …privée. C’est l’objectif du patronat et cela n’a évidemment plus rien à voir avec la Sécu crée en 1945.
La CGT a publié le discours de Lepaon à Matignon. Il dénonce les mesures gouvernementales et à défaut de revendications claires, propose une politique d’accompagnement discutant« des modalités d’un pacte, des objectifs économiques et sociaux. Les aides doivent être concentrées sur les secteurs et les entreprises qui en ont vraiment besoin, en particulier dans l’industrie… elles doivent être conditionnées à la mise en œuvre d’objectifs économiques et sociaux clairs ».
Mailly a appelé mercredi 29/01 lors du meeting de FO à une "journée de rassemblements et manifestations" le 18 mars, CGT, FSU et solidaires n’ont pas réagi par un grand enthousiasme mais n’ont pas non plus fermé la porte à une initiative unitaire.
Le salaire socialisé finance à 60 % la Sécu, mais aussi les retraites complémentaires, et une partie de l’UNEDIC.
Le montant des cotisations sociales versées aux URSSAF, à l’UNEDIC et aux caisses de retraites complémentaires est supérieur au budget de l’Etat :
Recettes totales Cotisations sociales
Etat 275 milliards (recettes fiscales)
Séc. Soc. 441 milliards -1/5ème du PIB 245,7 milliards
Protec. Soc. 633,1 milliards 1/3 du PIB 354 milliards
354 milliards d’€ de cotisations sociales échappent au profit et aux circuits financiers et pourraient être soustraits de la poche des salariés au bénéfice des patrons. C’est un enjeu colossal !
Le gouvernement prétend compenser cette nouvelle vague d’exonérations par des économies. C’est donc une double attaque : vol de salaire et austérité c’est-à-dire des prestations sociales minimales. Le “pacte de responsabilité” engage un processus : le retour à une protection sociale minimale pour les plus pauvres, payée par la fiscalité, et pour ceux qui auraient les moyens, recours aux assurances privées et aux fonds de pensions.
La classe capitaliste aurait ainsi accaparé une part colossale des richesses et la classe ouvrière qui a pu se constituer en « classe pour soi » grâce à la Sécu connaîtrait un grand recul.
Sans excès on peut qualifier ce recul, d’un recul de civilisation
Pour le NPA, il s’agit d’engager une ambitieuse campagne politique de sensibilisation et préparer la mobilisation
Les thèmes de la campagne :
* Réduction des prestations et fiscalisation, c’est la destruction de la Sécurité sociale issue du rapport de force 1945 qui se prépare. Il faut expliquer et dénoncer les mesures et les projets du gouvernement et appeler au retrait du pacte de responsabilité. Nous ne voulons pas d’une Sécu minimum pour les plus pauvres et du recours au marché des assurances pour ceux le peuvent.
* Nous revendiquons dans une perspective anticapitaliste, la généralisation du salaire socialisé de la naissance à la mort : prestations familiales dès le 1er enfant, allocations d’études, extension des aides pour le logement, pensions de retraite assurant la continuité du salaire, accès gratuit aux soins pour tous et toutes.
Cette revendication de la généralisation du salaire collectif et mutualisé de la naissance à la mort est incompatible avec le fonctionnement même du système fondé sur le profit. C’est une démarche transitoire, partant d’objectifs concrets et débouchant sur la remise en cause du système du capitaliste.
* La campagne doit aussi intégrer la défense de l’hôpital public. Les nouvelles coupes budgétaires vont accélérer son démantèlement. Le « service hospitalier » sera réduit à quelques grandes « usines à malades » pour les pathologies lourdes et coûteuses parallèlement à l’expansion des cliniques privées, de plus en plus souvent cotées en bourse. L’hôpital public était le seul lieu où du PDG au chômeur, chacun pouvait recevoir les mêmes soins. Forfait hospitalier, consultations privées et dépassement d’honoraires, délais d’attente.... ce n’est plus tout à fait le cas aujourd’hui et le risque maintenant est que ce ne soit plus qu’un souvenir lointain !