Les élections de ce 27 septembre étaient les troisièmes en l’espace de quelques années : 2010, 2012, et 2015. Ces élections ont été marquées par une participation-record : 77 % en 2015, contre 57 % en 2010 et 68 % en 2012.
Les deux listes indépendantistes, « Junts per si » regroupant la droite catalaniste d’Artur Mas et la liste de la gauche radicale indépendantiste de la CUP, ont obtenu une majorité absolue en sièges : 62 sièges pour le parti de Mas, 10 pour la CUP, soit 72 sièges sur 135, au-delà de la majorité de sièges visée.
Mais s’ils ont obtenu la majorité des sièges, ils n’ont pas eu la majorité en nombre de voix exprimées.
Ces élections ont clairement été un plébiscite : pour ou contre l’indépendance. Mas revendique la victoire, mais la droite catalaniste est désormais au pied du mur, contrainte d’engager un processus d’indépendance qui va concerner 16 % de la population de l’État espagnol, 19 % du PIB et 25 % de ses exportations.
Il y a au moins trois enseignements à tirer :
Une gifle pour le chef du gouvernement, Rajoy, qui s’est impliqué personnellement dans la campagne et a appelé la veille du scrutin - en catalan - à ne pas voter pour les indépendantistes,
Le reflet d’une forte mobilisation populaire derrière les partisans de l’indépendance,
Le début d’un processus politique qui peut réserver beaucoup de surprises.
Ainsi, les contradictions au sein du mouvement indépendantiste vont se produire dès le premier vote du nouveau Parlement, qui doit élire le président de la « Generalitat ». La CUP a annoncé, avant même les élections, qu’elle ne voterait pas pour Mas. Et cette contradiction ne sera pas la seule, tant le programme néolibéral de Mas et les revendications sociales de la CUP s’opposent. Dès lors, plane une inconnue : que va faire la CUP, lorsque ces deux orientations vont se contredire ?
Présentée par Podem (Podemos en Catalogne), la liste « Catalunya, si que est pot », alliance électorale entre Initiative pour la Catalogne, la Gauche Unie et Podem, a obtenu 11 sièges : 8,94 % voix, soit 366 494 voix . Même si les résultats n ont pas été à la hauteur des attentes, pour la première fois, Anticapitalistas aura deux représentants au Parlement régional.
Dans ces élections, il a été difficile de faire entendre des revendications sociales, tant ces échéances ont été polarisées par le problème de l’indépendance. Mais gageons que très bientôt, nos camarades se retrouveront coude à coude dans la rue, avec bien des électeurs de la CUP, qui n’accepteront pas la politique propatronale de Mas, adepte de la politique de l’IBEX 35, l’équivalent espagnol du CAC 40.
La présence au Parlement régional donnera à nos camarades une tribune pour dénoncer les mauvais coups du gouvernement Mas et populariser les luttes sociales. Un point d’appui important. Et dès le lendemain des élections, deux des élus de « Catalunya, si que est pot » sont intervenus pour empêcher une expulsion, comme ils le font d’habitude !
Ces élections marquent une étape dans l’histoire de l’Espagne. Pour notre courant, elles marquent indiscutablement le début d un processus politique et social, complexe et passionnant, marqué par des élections générales en décembre prochain.
César Aragón et Jean-Marie Bénaben