Jamais l’issue d’une élection présidentielle n’aura été aussi incertaine. Selon les derniers sondages, les écarts entre les quatre favoris (Le Pen, Macron, Mélenchon et Fillon) se resserrent. Personne, aujourd’hui, ne peut prédire quel sera le duel du second tour même si la présence du Front national et de sa candidate reste l’hypothèse la plus probable. Cette incertitude est le reflet d’une crise politique essentiellement marquée par la désagrégation de l’hégémonie des partis traditionnels (LR et surtout PS) perçus à juste titre comme responsables des politiques désastreuses menées depuis des décennies et, de manière combinée, par une défiance populaire de plus en plus profonde vis-à-vis des institutions de la Ve République qui favorisent l’accaparement du pouvoir par une caste politicienne au service des capitalistes.
De cette crise politique, le FN essaye de tirer son épingle du jeu en se présentant, comme à son habitude, en champion de l’anti-système. Pourtant, les affaires qui le rattrapent à nouveau mettent à mal cette posture. Le « missile » envoyé par Philippe Poutou lors du Grand débat du mardi 4 avril a permis de mettre en lumière de manière très audible, à une échelle de masse, que Le Pen n’est pas seulement la porte-drapeau du nationalisme, du racisme, du sexisme ou de l’homophobie, elle est également la candidate du « Nanti-système », celle qui profite, comme beaucoup d’autres, des règles du jeu existantes pour se protéger et pour piquer dans les caisses publiques. Pour faire face au danger fasciste qu’elle incarne, tourner encore et encore ce couteau dans la plaie est nécessaire pour continuer à faire tomber le masque tout comme il est indispensable d’amplifier les mobilisations contre ses meetings avant le premier tour et de se préparer à envahir la rue, occuper les places, si elle se qualifie pour le second.
Aussi, dans cette situation très particulière, parmi les évolutions majeures de ces dernières semaines, en dehors du fait que Fillon se débat sans cesse sous une pluie continue de nouvelles révélations qui ne semblent plus effriter sa base électorale radicalisée et du fait que la bulle Macron commence à se dégonfler à mesure qu’il apparait comme un libéral décomplexé, l’épisode marquant est la dynamique autour de la candidature de Jean-Luc Mélenchon. En soit, c’est un signe positif pour notre camp social. La colère de millions d’électeurs se cristallise sur les questions sociales et démocratiques. Ils envisagent de voter pour un homme qui, à leurs yeux, incarne le changement de république et le rejet des politiques pro-Medef conduites depuis cinq ans par le PS et auparavant par la droite et qui, surtout, est capable de l’emporter. Dès lors, pour un nombre croissant de personnes dans nos milieux militants, professionnels, familiaux et dans nos cercles d’amis, le vote Mélenchon est, quand il n’est pas un vote d’adhésion, présenté et défendu comme le vote utile à gauche.
Nous, militants du NPA, ne sommes pas insensibles à ce discours. De surcroît, Jean-Luc Mélenchon, même si nous avons d’importants désaccords de fond avec lui, n’est pas notre adversaire. Son élection, qui reste encore improbable, ne serait certes pas une mauvaise nouvelle au regard de ceux qui l’entourent dans le sprint final. Toutefois, il est fondamental d’affirmer, pour tenter de dissiper les illusions, qu’il n’est pas et ne sera jamais la solution. Celle-ci est ailleurs et c’est ce que la candidature de Philippe Poutou permet d’exprimer.
Pour en finir avec le capitalisme qui ne peut avoir de visage humain, qui broie nos vies, qui est basé sur la soif de profits d’une minorité au détriment de la satisfaction de nos besoins, qui détruit la planète, les écosystèmes, la biodiversité et qui engendre et/ou perpétue des oppressions telles que le racisme dont le visage principal aujourd’hui est l’islamophobie, la solution c’est NOUS. Pour en finir avec les frontières, pour que la liberté de circulation et d’installation soit un droit universel, pour mettre fin aux souffrances et aux traitements inhumains réservés aux migrants, pour s’opposer aux guerres impérialistes, pour aider à mettre hors d’état de nuire des bouchers tels que Hassad ou Poutine, pour soutenir les révolutionnaires syriens, irakiens, kurdes ou palestiniens combattant armes à la main, la solution c’est NOUS.
C’est le message porté par Philippe Poutou. Les élections dans le cadre institutionnel existant ne résolvent jamais nos problèmes. Il n’y point de salut en dehors de l’auto-organisation des exploité•e•s et des opprimé•e•s. Nous devons et pouvons prendre en mains nos vies, nos affaires. Seule notre irruption, massive, sur la scène politique, en luttant, peut changer le cours de l’histoire. Pour cette raison, pour défendre et alimenter cette perspective, voter Poutou c’est voter utile. C’est voter pour souffler sur les braises du mouvement « contre le Loi travail et son monde » du printemps dernier. C’est voter pour nous préparer au mieux aux résistances et aux offensives que nous devront mener à l’issue de cette élection présidentielle et ce quel qu’en soit le résultat. Nous sommes utopistes ? Nous rêvons ?
Oui ! Nous rêvons d’un autre monde parce que nos vies valent plus que leurs profits. Et nos rêves sont de ceux qui nous font agir parce que nous savons que personne ne les réalisera à notre place, il n’y a pas de sauveur suprême ! Seulement nous-mêmes mobilisés, auto-organisés, déterminés et forts de nos rêves !
Christine Poupin, porte-parole du NPA